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Ses oeuvres semblent proches de miniatures persanes. Ces traits ronds comme Ronel s’érigent en totems, organisent des voyages extraordinaires à dos d’éléphant ou dans des arches antédiluviens. Ils ouvrent l’espace-temps ignoré par le profane où l’homme, la flore et la faune, la nature tout entière communiquent. Et ses architectures semblent fêter la beauté d’un monde harmonieux.

Fils du peintre paysagiste Marcel Laquay, il n’a pas échappé au métier. Il y a des histoires comme cela, comme à la Renaissance, artiste de père en fils. De peinture, il est nourrit au biberon. Puis des livres, des musées, des conversations… Dans ce petit milieu où la peinture est le centre d’intérêt du ménage, on est un peu en dehors du monde ordinaire. On développe la culture du détail et de la forme, on appelle les couleurs par leurs noms, on pèse la densité des matières, on se réjouit de la beauté des motifs. Même les griffures de murs et les taches disgracieuses relèvent de la magie pour l’oeil qui travaille. Intercepter les rapports entre les choses procure un étonnement sensuel et un plaisir fou.

N’est pas artiste qui veut. Le peintre apprécie autrement la peinture parce que toute l’orientation de son être et de son esprit est à l’oeuvre pour discerner les symptômes des choses qui nous entourent, diagnostiquer leurs apparences, analyser les degrés qui les différencient… extraire leur beauté, leur laideur. Tout ce qui le préoccupe c’est de transmettre ce monde impalpable qu’est le monde vu par la culture de l’émotion et de l’imagination. Pour lui, toute la difficulté consiste dans le saut qu’il doit accomplir entre l’oeil et la feuille vierge, écrivait le critique allemand G.E. Lessing au XVIII° siècle. L’outil est important : C. Ronel trouve un papier et me montre un drôle de « pinceau feutre à la pointe fine. On me l’a offert au Japon. Il résorbe et donne une gestuelle très particulière…Il faut travailler par écrasement, on peut même en faire des taches ». Une tête cernée par endroits en résulte comme par enchantement. « Une mine de crayon ne donne pas les mêmes écritures. »

Carnets de passages.

Très tôt, C. Ronel est sensible à la liberté introduite dans l’art par les artistes bruts. Il admire Auguste Lesage par exemple, et aussi le traitement de la matière par le mouvement CoBrA, et son esprit est étrangement réceptif à la cosmologie. Contrairement à la plupart des artistes contemporains qui s’inspirent des images du web, C. Ronel glane ses idées sur le vif. Ces carnets de voyage rendent compte de la réalité foisonnante du monde tel qu’il est, avec ses paysages, ses visages, ses couleurs et ses croyances invisibles qui le doublent et l’épaississent. C’est une écriture à part, rapide, percutante. Une fois à l’atelier un autre travail commence. Un travail d’intériorisation où la réalité se transforme en poésie.

Les titres répondent à l’image : La conférence des oiseaux, par exemple, est une véritable noce de Cana cosmique. Hommes, femmes et oiseaux festoient dans un ailleurs à la fois intérieur et extérieur. Le trait courre, s’arrête, hache, repart, se prolonge, se tortille, s’affirme rond et précis, jouant de toutes les gammes majeures et mineures, inspirant des mélopées étranges, s’enrichissant des rythmiques endiablées. L’univers est frontal comme la peinture avant l’invention de la perspective, mais les plages monochromes ouvrent des horizons au-dessus des mers et des fleuves, au bord desquels la vie, toujours la vie, mélange ses voeux aux mystères de l’univers.

Sinuosités, hachures, inscriptions s’accordent aux lumières ocre, les rouges pourpres s’enflamment, les bleus reposent le regard. Les personnages, les paysages, les éléphants, les rhinocéros, les êtres fantastiques  vivent des aventures fabuleuses, dans des pays dont la réalité est attestée par ces images aux mille facettes. Et quand tous les mystères de l’Asie miroitent dans une tache lumineuse et aquatique, on se dit : étrange métier que d’être peintre. N’est-ce pas ?

Iléana Cornéa

Christophe Ronel, étrange métier que d’être peintre…

Revue Artension 2018

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Les spasmes  du sol et le cirque du destin.

le sol de Christophe Ronel chahute, bascule, se bouscule, se renverse, chavire.

Il tournoie, tournique, tourbillonne, virevolte, virevouste, gire.

Ivre, le sol vire. Brinde zingue, il pirouette.

Le sol est zébré, tigré, alezan, arzel, bai, argenté ou doré, moucheté,

miroité, zain, rubican, truité, tisonné.

Il est parfois fendillé, craquelé, lézardé.

Il vibre, frétille, bouge, se balance, se dépense, gesticule.

Le sol peut être orageux, troublé, bouleversé, hagard, fiévreux.

Sens dessus dessous, le sol se convulse.

Révolution du territoire ; ses soubresauts ; ses spasmes ; ses frissons…

A travers le monde, tu rencontres les noms sonores des villes, les couleurs intenses, 

les caresses des humains et des choses, les parfums capiteux, les gourmandises raffinées, 

les douceurs inconnues. Tu étais l’enfant géographe de Baudelaire : 

« Pour l’enfant, amoureux de cartes et d’estampes, / L’univers est égal à son vaste appétit. »

Gilbert Lascault

  Le  colporteur des  chimères

Préface du catalogue 2000

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Christophe Ronel appartient à l’étrange famille des voyageurs imaginaires, pourtant, c’est avec une relative régularité qu’il parcourt l’Afrique noire ou blanche dont il s’est de longue date épris, ou encore l’Asie ainsi que tout ce qui vient nourrir son appétit pour l’ailleurs.

De retour à l’atelier, le peintre dissèque ses nombreuses notes, démonte, et ré-agence, superpose le visible et l’imaginaire, perturbe l’ordre des choses pour nous livrer au final des tableaux labyrinthiques qui s’adressent à un spectateur ébloui et emporté dans les méandres de la matière et de la représentation.

Le fictif et l’observé s’enchevêtrement dans ses savantes compositions d’une densité qui fait songer à Jérôme Bosch, Augustin Lesage ou encore à la miniature persane. car s’il y a de la texture, de la densité picturale chez Ronel qui paraît autant graphiste que coloriste, on trouve dans le curieux monde de ce peintre de la fable, du conte, de l’épopée, on y croise du primitif, de l’antique, du médiéval et une large part d’oriental.

Christophe nous entraîne dans une dérive voyageuse, une délicieuse errance émaillée de références enfouies : Homère, Hérodote, Marco Polo, Calvino.

Le peintre se situe en bordure des mots, ses peintures ne racontent rien mais elles proposent des pistes pour que chacun « tisse ses histoires », entre humour et onirisme.

Patrice de la Perrière

Univers des arts  2010

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Ceux qui voyagent le savent bien ; on a beau ouvrir les yeux, mitrailler avec application tout ce qui bouge, tout ce qui semble sur le moment extra-ordinaire, la mémoire imprime mal, et si  l’on se souvient au retour d’insignes détails, il faut bien admettre que, la plupart du temps, on perd tout ou partie de ce que l’oeil a pu contempler. Les photos, et même les vidéos, rendent souvent bien imparfaitement la saveur du séjour…

Même après avoir visité des pays aux modes de vie différents du nôtre, telle l’Inde par exemple, lieu mythique au sein duquel jaillit à chaque pas toute une vie grouillante et chamarrée, tenter de conserver des images nettes est un voeu pieux ; des pans entiers de foule, de palais, de ruelles, s’effacent inexorablement… Ronel le sait bien qui dessine plus vite que son ombre avant que la mémoire ne le trahisse. Il a, qualité non négligeable, le goût du détail, et parvient à traduire en peinture les ambiances uniques de pays lointains. Son oeuvre est un foisonnement magnifique qui engendre le rêve et donne envie de prendre le premier avion en partance pour…ailleurs. Mais Ronel n’est pas un de ces peintres adeptes du carnet de voyages, ces artistes qui cherchent à faire de l’étape en montrant de « l’exotisme ». Non, non, regardez-y de plus près… Sa peinture est une invention, je veux dire que si elle a un fond de vérité, elle ne nous touche que parce que l’imagination de l’artiste a su transformer la réalité en une espèce de vision onirique. Chaque tableau est tout à la fois témoignage et création. Et c’est là sans doute que cet art au fond joyeux réussit son coup ; il nous donne mieux à voir les pays visités par l’artiste que bien des images d’Epinal, fussent-elles prises d’avion…

Et la fantaisie, la volonté de trouver des angles inédits, le goût de la couleur ne cessent d’habiter cette oeuvre qui, on l’aura compris, se nourrit autant du réel que de l’imaginaire. Ronel prend prétexte de la géographie du monde pour nous emmener vers des contrées bien à lui. C’est une lente dérive volontaire, qui n’a pas pour but d’enjoliver mais au fond de sanctifier. Les tableaux de Ronel sont des icônes, des projections de ce qu’est et de ce que pourrait être le monde, des impressions expressionnistes…

Ludovic Duhamel

Voyages enchanteurs 

Miroir De L’Art 2007

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Le monde est une bosse, le monde est une montagne que dévale en éclaboussant ses rives un torrent de peinture, une cascade, une cataracte bienfaisante pour les terres arides, pour les populations altérées. Voyez comme elle bondit, d’un pôle à l’autre, comme elle s’épand sur les deux hémisphères ! Voyez comme elle fait danser l’arche des animaux qui abattent fraternellement la moitié de notre besogne ! Elle embarque le dromadaire, vaisseau du désert enfin à flot, et le petit âne si dur à la tâche, regardez-le prendre pour une fois un peu de repos dans ce bain où chaque couleur est un piment frais et croquant comme il les aime. Voici maintenant l’éléphant délesté de son poids harassant, il flotte lui aussi, porté par la généreuse coulée de peinture que rien ne semble devoir interrompre et qui jaillit toujours, ardente et tumultueuse comme lave en fusion.

Mais pas de panique. Non point de cette lave qui calcine les pentes et pétrifie les êtres, au contraire, bien au contraire, une lave giboyeuse, poissonneuse, nourricière, où la foule humaine aussi s’ébat dans son élément. Finira-t-on par trouver cette planète habitable ? Ce n’est pourtant pas que Ronel nous trompe. Qu’il voyage dans le Sahara, en Inde, au Japon ou au Guatemala, son œil perçoit le détail aussi bien que l’ensemble. La fourmi ne manque pas à ces fourmillants tableaux. Campez-vous devant l’un de ceux qu’il a rapportés du Mali, vous y trouverez assez d’informations pour faire croire à n’importe qui que vous avez vécu dix ans à Mopti du produit de votre pêche. Je n’ai jamais vu frétiller si joyeusement la vérité hors de son puits. Tout y est.

Tout y est, et pourtant – telle est la force du style –, nous sommes bien là dans le monde rêvé par Ronel. Un rêve qui prend forme dans l’atelier. Voici le monde posé sur le tour de l’artiste, à sa merci. Dorénavant, sachez-le, la Turquie, le Mexique, Barcelone et l’Egypte voisinent sur la même colline, la colline Ronel, une colline ronde comme une carapace de tortue aux écailles rutilantes où se croisent les trajectoires de récits dont nous ne connaîtrons que l’intense suspense, où tout mouvement ordonne une fête, une féerie, en lieu et place de la catastrophe banale que le moindre de nos gestes entraîne : tandis que Ronel peint, les autres hommes donnent de malencontreux coups de pieds dans des seaux de goudron. Certes, il n’a pas fini de repasser derrière nous avec ses pinceaux flambant neuf.

Nous flanquons tout par terre, comptant sur lui désormais pour réordonner les savants déséquilibres de ses villes vacillantes, solidement enracinées néanmoins. Ça tangue, mais sur un dos d’éléphant. Le monde se promène dans les tableaux de Ronel, il se donne en spectacle, il n’est plus ce globe fermé comme un poing, clos sur lui-même, ce pangolin roulé en boule, il se déplie, se déploie, s’ouvre en éventail et chasse sa vieille poussière. Il va voir ailleurs. On dirait soudain une nouvelle étoile.

Eric Chevillard

Sur la colline Ronel

Préface du catalogue, Palais Bénédictine 2008

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A sa façon, Ronel est un collectionneur qui s’ignore. Á chaque tableau, il s’invente une destination, une contrée, un archipel perdu, un territoire exponentiel avec ses casemates, ses ruelles insoupçonnées, ses stratifications secrètes, ses taxis-brousses, ses vélocipèdes en goguettes, ses pirogues et ses malles-postes chargées de grandes et de petites histoires. Ses peuplades qui prolifèrent à la vitesse grand V sont originaires des quatre coins du monde, de préférence de pays où l’on aime bien s’entourer de gris-gris, d’échafaudages de bambous, de tissus bariolés, de costumes extravagants, de troupeaux de zébus, de cases à palabres, de rumeurs et de prophéties ambulantes. Que ce soit en Afrique, en Asie, en Amérique latine ou en Océanie, Ronel a l’œil sur les périmètres de vie en pleine implosion. Cités périphériques, marchés flottants, gares routières, huttes surélevées, fourgonnettes surpeuplées, îlots artificiels, cabanes à roulettes, embarcations légères, trapèzes volants, villes lacustres, tout habitat inspire son espace-temps qui se déplace en fonction de notre imaginaire. Ronel – on l’aura compris- a l’âme vagabonde. Jamais à court d’inspiration, toujours en quête d’escapades à l’autre bout du monde, ses acryliques reflètent les turbulences de quelques greniers sur pilotis, les us et coutumes, riches en couleurs et en saveurs, de marchés à ciel ouvert, les dérives d’un crépuscule au fin fond de la savane avec, cela va sans dire, des teintes chatoyantes à souhait. Sous les tropiques de Christophe Ronel, les baobabs sont rois et les griots, toujours très entourés, s’en donnent à cœur joie…Un brin tentaculaire, les agglomérations sur l’eau de Christophe Ronel ressemblent à de vastes termitières qui font feu de tous bois. On y croise une faune mouvante, composée de mages, de vendeurs à la  sauvette, de diseuses de bonne aventure, de passeurs et de bergers d’un autre âge. On y rencontre des embarcations sur le point de rejoindre leur cortège d’ombres et de lumières, des pagodes turbulentes, surchargées de victuailles, comme pourraient l’être quelques arches de Noé… Fantasmagorique, débordante de vitalité, cette œuvre en devenir vaut bien plus que le simple coup d’œil !

Valère-Marie Marchand

Une Mosaïque exponentielle

Revue Arts Actualités Magazine 2008

 

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La peinture de Christophe Ronel inventerait un pays à la fois utopique et concret.

Elle ne définirait nul Empir , nul Etat . Elle multiplierait des scènes disparates des images égarée , des visions vagabondes, des éclairages inattendus, des éblouissements insoupçonnés. Elle serait nomade et lucide en une errance sagace et colorée, en une randonnée africaine  : un voyage incandescent . Sous un soleil exact entre les tropiques , cette peinture supposerait des parcours visités, des carnets de dessins, des notes teintées; puis, dans l’atelier, elle construirait une Afrique imaginaire, métamorphosée.

Christophe Ronel m’explique :  " Mon travail, me semble-t-il , suppose un écart, une distance par rapport à des territoires parcourus, visités consignés dans des carnets ; puis, une reconstruction réalisée dans l’atelier jouerait le rôle d’un écran, d’une séparation. L’atelier filtrerait en quelque sorte les notes initiales afin de nourrir et de développer un univers personnel . L’atelier serait une sorte de laboratoire dans lequel souvenirs des lieux, anecdotes liées, sensations retenues s’enchevêtrent, se superposent, se déplacent, s’agglomèrent. "(…)

Gilbert Lascault

Senemali

Préface du catalogue, Galerie Suzanne Tarasiève 2003

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Ronel transgresse avec une jubilation non dissimulée les impressions recueillies, ce qui procure à ses œuvres une fertilité poétique incontestable et , concentrant toutes les diversités esthétiques en une cohérence graphique, il en préserve ainsi toute la magie. Ses fantasmagories racontent un univers fabuleux où pourtant nous pouvons, à notre tour, nous frayer un chemin et inventer, avec un plaisir non dissimulé, notre aventure féerique particulière.

Françoise de Céligny 

Revue Univers Des Arts

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Le monde selon Ronel ressemble à une immense place de marché, un caravansérail, un cirque de plein vent où sont mêlés rêves et souvenirs ( Ronelius circus). Moqueur, mais sans méchanceté, il n’est pas dupe de la sottise ni de l’absurdité du monde, mais préfère pour sa part en sourire. Son sens de la mythologie et sa culture effervescente nourrissent le moindre de ses projets. C’est un artiste baroque, charismatique, fourmillant d’ idées et de thèmes, un braconnier de l’imaginaire .

Luis Porquet

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Cela commencerait par une signature, un lien de ralliement : Ronel, comme un code oublié, intemporel .

R , peut-être comme Rouge ; O comme Orient ; N comme Noire ; E comme Eléphants (pourquoi pas ? ) ; L comme — allons-y franchement — Lumière.

A ce stade, on aurait encore rien dit, rien vu . Ni tapis, ni dallages, ni turbans, dromadaires, yeux, moustaches, ni… Au bout de l’inventaire, on serait encore Gros-Jean comme devant. C’est que les chameaux , chez Ronel, sont "  contorsionnistes ", que les convois abritent — regardez ! — de " petites voluptés ", que le nuage est " effleuré " . Ce monde en métamorphose, dans lequel un jeu verbal relance sans cesse autrement le jeu pictural, ne nous est jamais livré au premier degré  ! Une fois les objets passés à la trappe ( leur dénombrement serait infini ), reste l’humour. Et, oubliés les prétextes figuratifs ( n’est-ce pas la Maya, l’illusion ?), demeurent des " espèces d’espaces " qui, à l’évidence, dépaysent plus notre regard que leurs ingrédients plus immédiatement repérables.(…)

Jean-Charles Gaudy

Rajpoutana

1998

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Devant les œuvres de Christophe Ronel, on rêve à ce mythe, méditerranéen entre tous, qu’est l’Atlantide.

Mythe bien vivant et que ravivent encore à chaque génération de nouvelles exhumations auxquelles les artistes comme Ronel, ( et quelques autres qui ont pris la relève des fameux "Orientalistes " romantiques ) donnent une soudaine présence, des plus suggestives. Elle va, cette incessante, cette insistante Atlantide, de l’âpre Levant Ibérique aux sables ocres du Sahara .

Elle a tracé les écritures minoennes, restées indéchiffrées, et le tifinagh des Imazighen, attestés deux millénaires avant notre ère, et que nous appelons aujourd’hui Berbères . Elle est dans une organisation labyrinthique de l’espace, souk ou ksar, et dans la profusion des figurations traditionnelles, qui remontent sans doute aux idoles de Cnossos et aux pendeloques carthaginoises, avant de s’être croisées avec les formes et les rythmes de l’Afrique Noire .

On devine que , pour un " nouvel orientaliste " comme Ronel, c’est le plus irrésistible des appels vers une sorte d’Odyssée immémoriale , dont ses tableaux marquent les étapes imaginaires ou réelles.

Jean-Clarence Lambert

Préface du catalogue Galerie Suzanne Tarasiève 1996

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A Christophe Ronel

Je connaissais votre peinture  au travers des « Déluges, et autres Marinades », de divers « Insectaries d’Août », de certain « Petit éloge de la terre », ou lorsque vous voyagiez picturalement de « Sarah au Sahara ». Ailleurs, vous disiez que cela « venait du très peu, du presque rien ». Vous parliez des crues, des décrues, des voyages enfouis dans la mémoire, des paysages insensés sortis de l’érosion et du séisme, et vous évoquiez, toujours sous une plume féconde , les empilements de strates, les superpositions, les vies recouvertes , les insectes carapacés, fourmillant ou égarés, resongés. Des digestions, des dissolutions de l’esprit se retrouvent en de larges récits qui assemblent les zoomorphes, les anthropomorphes auxquelles viennent se lier les pictogrammes, en une sorte d’amoncèlement, de sédiments, qui n’attendent plus que l’ultime déluge pour, nomades ou méharées, se répandre sous nos yeux afin de donner à votre peinture une identité novatrice.

Vous aimez, cher Christophe Ronel, vous perdre dans les dédales ocrés de bandes terreuses où vous rêvez à des oueds inouïs aux polychromies sombres et sableuses afin d’y retrouver, comme par hasard, telle ou telle de vos frises qui viendrait insérer votre propre récit dans la culture locale? Oui, mais, ce « local » - ou plutôt cette localisation- comment la situer ? Vos voyages nombreux, mêlés à vos rêves et à votre large culture, semblent éloignés, perdus ou au contraire tellement proches !

De toile en toile, d’oeuvre en oeuvre, de découverte en découverte, vous nous conduisez jusqu’à l’instant de la révélation d’un orientalisme baroque, intelligent, logorrhéique, mais très efficace. Grace à vous, cher Christophe Ronel, nous nous replongeons tous dans le bonheur de notre propre origine, dans la joie indicible du retour en arrière primordial. Merci.

Patrick-Gilles Persin

1992

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Christophe Ronel est un magicien doué d’un étonnant don d’ubiquité ? Ici et là, il parcourt le monde d’un œil malicieux.

Il sait être partout à la fois pour inventer un univers pictural aux couleurs de ses rêves. 

Poète ? Probablement. Peintre ? Assurément. Humaniste ? Evidemment. Malgré les tempêtes des siècles, il nous redit la confiance en l’homme dans une ébouriffante saga picturale où l’animal nous donnerait des leçons de sagesse (…)

Ronel est un peintre magique.

Il investit des territoires mythiques, carnet de croquis en main, qu’il introduit peu à peu dans son monde singulier, proliférant et jubilatoire. Une aventure picturale doublée d’une merveilleuse exploration intérieure.

Christophe Ronel est un assembleur, un collectionneur itinérant, avide de voyages. Sa peinture rassemble ce qui ne se rencontrera jamais dans « le vrai monde ». Elle se veut résolument animiste, insufflant aux êtres, aux animaux, aux racines, aux déserts et aux nuages une vitalité plastique, une vie profonde et profuse. Une peinture qui fascine par son caractère inclassable : mieux on la connaît, plus elle nous échappe dévoilant une multiplicité d’approches, de lectures et de pistes insoupçonnées.

Gérard Gamand

Rédacteur en chef du magazine AZART